lundi 4 septembre 2017

LIVRE /// MEMOIRES DE PORC EPIC - ALAIN MABANCKOU -


MEMOIRES DE PORC-EPIC

D’ALAIN MABANCKOU

 

Venant de rentrer d’un concert fort festif de « La Mine de Rien », avec  encore des mélodies plein la tête et du rythme dans le corps, il n’est pas possible de dormir de suite ; alors  autant poursuivre la soirée en vous parlant d’une de mes lectures récentes  « Mémoires de porc-épic » d’Alain Mabanckou.
 

Un porc-épic, qui est en fait le double animal de Kibandi, fait le récit de sa vie à un grand baobab. Autant le préciser en préambule, il  est de la famille  des « doubles nuisibles ». Il va alors expliquer comment pendant quarante ans, il a obéi à son maître en tuant ses ennemis à l’aide de ses grands piquants.

Et puis, il faut que je vous dise aussi, nous sommes loin de la logique cartésienne de l’Occident où tout doit s ‘expliquer. Nous nous trouvons en Afrique !

 Extrait :  « car, mon cher Baobab, ces hommes qui vont en Europe, nom d'un porc-épic, deviennent si bornés qu'ils estiment que les histoires de doubles n'existent que dans les romans africains, et ça les amuse plutôt que de les inciter à la réflexion, ils préfèrent raisonner sous la protection de la science des blancs, et ils ont appris des raisonnements qui leur font dire que chaque phénomène a une explication scientifique”.

 Ce récit, sans points (mais avec des virgules) et sans majuscules (on s’y fait très vite, mais il ne faut pas lâcher le texte des yeux et continuer à lire sans s’arrêter) mais découpé en chapitres (là on peut lever les yeux et respirer !), se  lit comme il pourrait s’écouter d’un conteur racontant une fable.


 Il nous surprend, nous dépayse, nous tient en haleine avec des histoires de possession, de rituel, de magie, nous emmène dans un monde inconnu où les morts peuvent désigner leur assassin pour qui sait les écouter.

Et puis le porc-épic se livre à des réflexions sur  la nature humaine, sur ceux qu’il nomme « les cousins germains des singes »

 Extrait : « pour simplifier les choses et ne pas polluer ton esprit, je dirai que les romans sont des livres que les hommes écrivent dans le but de raconter des choses qui ne sont pas vraies, ils prétendent que ça vient de leur imagination, il y en a parmi ces romanciers qui vendraient leur mère ou leur père pour me voler le destin de porc-épic, ils s'en inspireraient »

 
C’est terriblement rafraichissant d’autant que le récit est également émaillé de proverbes tels que ceux-ci :

 « Quand on coupe les oreilles, le cou devrait s’inquiéter »

« Le tambour est fait de la peau du faon qui s’est éloigné de sa mère »

« Si tu veux que Dieu se marre, raconte-lui tes projets. »

 
Alain Mabanckou s’approprie des contes oraux africains pour nous les restituer sous forme de fable philosophique, ce qui donne un charme fou à ce livre qui fut récompensé du prix Renaudot en 2006.

 

Bonne et belle lecture

JC Togrège
03/05/2014

PS du 04/09/2017 : article de 2014 que je publie de nouveau après avoir lu "Verre cassé" du même auteur.

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