mercredi 27 septembre 2017

LIVRE /// AMERICANAH - CHIMAMANDA NGOZI ADICHIE : Un grand souffle romanesque pour un livre avec du fond !

AMERICANAH
CHIMAMANDA NGOZI ADICHIE



Quel dépaysement et quel souffle romanesque pour un livre engagé !  En somme un choc littéraire comme je les aime, un de ces livres qui nous embarquent totalement, qui nous font réfléchir et vont jusqu'à nous réveiller la nuit pour en lire quelques chapitres...

Si tout comme moi, vous pensez qu'on apprend aussi la vie dans les romans, qu'on apprend à y connaître l'autre, alors jetez-vous sur "Americanah". Les voix des deux personnages principaux (Ifemelu et Obinze) resteront longtemps en écho chez vous.

Americanah ? Joli titre qui accroche mais que désigne t'il ?
La romancière nous explique que l'on appelle ainsi au Nigeria les noirs qui ont quitté le pays pour l'Amérique et qui reviennent ensuite mais en étant plus ou moins "américanisés". Il n'y a rien de péjoratif dans le terme, c'est plutôt teinté d'une connotation ironique.



Et le Nigeria, vous connaissez ? J'avoue mon inculture qui m' a amené à consulter la carte de l'Afrique et le net. Alors, ce grand pays de 187 millions d'habitants se situe en Afrique de l'Ouest et a pour voisins le Niger, le Cameroun et le Tchad.  C'est une puissance économique sur le continent.
Peut-être le Biafra vous dit-il davantage quelque chose en souvenir de cette guerre sécessionniste de la fin des années 60 ?  Ce fut le sujet du livre précédent de l'auteur,  " l'autre moitié du soleil" que j'inscrit direct sur ma PAL . Eh bien, le Biafra est l'une des régions du Nigeria.

Mais revenons au livre et à ses personnages. Ifemelu part poursuivre ses études en Amérique, en laissant au pays son amoureux, Obinze, qui a pour projet de la rejoindre ensuite. Ces deux-là vivront une grande histoire d'amour tourmentée et intense.

Il ne s'agit de pas d'exilés fuyant la pauvreté. Ils font partie de la classe moyenne de leur pays, mais comme nombre de leurs compatriotes, l'Amérique est vue comme un Eldorado, là où tout est possible. Nous comprendrons avec eux ce que peut ressentir un déraciné  devant intégrer les codes propres à chaque pays.

Il y a tellement de choses dans "Americanah" (pavé de 680 pages en poche) qu'il est difficile de choisir celles à retenir ici pour vous convaincre de vivre ce beau moment de lecture qui vous fera voyager en Afrique, en Amérique avec un passage par l'Angleterre.

Imelu tient un blog pendant son long séjour en Amérique qui s'appelle " Observations diverses sur les Noirs américains (ceux qu'on appelait jadis les nègres) par une Noire non américaine" qui permet à la romancière nigériane de parler du racisme ordinaire. Quelques chroniques d'Imelu (dans un style différent de la narration) parsèment le récit.

Extrait : "Cher Noir non américain, quand tu fais le choix de venir en Amérique, tu deviens noir. Cesse de discuter. Cesse de dire je suis jamaïcain ou je suis ghanéen, l'Amérique s'en fiche. Quelle importance si tu n'es pas "noir" chez toi ? Tu es en Amérique à présent. Nous avons tous nos moments d'initiation dans la Société des anciens nègres. Le mien eut lieu en première année d'université quand on m'a demandé de donner le point de vue d'une Noire, alors que je n'avais pas la moindre idée de ce qu'était le pont de vue d'une Noire. Alors j'ai inventé. Et avoue-le - tu dis "je ne suis pas noir", uniquement parce que tu sais que le Noir se trouve tout en bas de l'échelle des races en Amérique. Et c'est ce que tu refuses. Ne le nie pas. Et si être noir te donnait tous les privilèges des Blancs ? Dirais-tu encore: "Ne me traitez pas de Noir, je suis originaire de Trinidad"? Je ne le crois pas. Donc, tu es noir, chéri (...)

Parmi les trouvailles du livre, les séances chez le coiffeur sont d'un grand intérêt. Vous y apprendrez tout sur le cheveu crépu et les coiffures afro, et ce n'est pas anecdotique. Imelu reviendra à ce type de coiffure après un passage où pour trouver plus facilement un travail, elle avait opté pour des cheveux défrisés. Ses cheveux seront son apanage, sa fierté, sa revendication (d'où la couverture du roman).

Différentes chansons ou chanteurs nigérian sont évoqués dans le livre (Bracket, Onyeka Onwenu) que j'ai eu plaisir à écouter une fois le livre terminé. Ce fut comme une façon musicale de prolonger l'ambiance de ce très beau roman.

https://www.youtube.com/watch?v=IahNmvmFOS4

Extrait " Il prit sa main, la garda serrée dans la sienne sur la table et le silence s'alourdit entre eux, un silence ancien qui leur était familier. Elle était à l'intérieur de ce silence et elle y était en sécurité."


Bonnes et belles lectures !

JC Togrège
27/09/2017


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