TOUS LES HOMMES N'HABITENT
PAS LE MONDE DE LA MÊME FAÇON
JEAN-PAUL DUBOIS
Avant d'entrer dans le récit, je vais d'abord m'arrêter sur le titre de ce livre, le trouvant particulièrement bien choisi et original, alors que chacun sait que c'est un exercice difficile.
Ne trouvez-pas qu'il sonne joliment, poétiquement ?
Ce titre fait s'interroger, voguer notre imagination avant même d'en avoir lu une seule page. Rien qu'en cela, je trouve que Jean-Paul Dubois est très fort.
Et puis, en y réfléchissant, il est vrai que nous n'habitons pas tous le monde de la même façon !
En exergue, il se trouve deux citations dont une de Rosalind Krauss qui me plait bien :
"Tout cela fait penser à la suite des jours à laquelle rien n'a donné forme ni direction, que rien n'habite ni n'anime et dans laquelle rien ne fait sens".
Je ne dirai rien de la seconde qui est de Charles Bukowski.
Mais arrivons enfin au sujet du livre.
Paul Hansen est en prison à Montréal depuis deux ans. Il nous fait le récit de sa vie carcérale dans la cellule qu'il partage avec un gros dur craint de tous (mais qui a un point faible très insolite) avec qui il s'entend bien. Ce récit sera entrecoupé des souvenirs de Paul des années 1950 jusqu'aux années 2000.
Paul est est l'enfant d'un couple hétéroclite composé d'un pasteur qui a perdu la foi et d'une femme féministe tenant un cinéma. Le couple connaitra des turbulences dans les années 1970 quand l'épouse voudra y diffuser "Gorge profonde", au titre suffisamment explicite pour n'en rien dire de plus...
En paraphrasant François Busnel, j'ajouterai que je ne "divulgache" pas grand chose car le roman est composé de bien d'autres événements et de personnages intéressants tant par leurs singularités que par leurs faiblesses.
Jean-Paul Dubois a une belle plume qui sait être originale et profonde.
A peine a t-on lu quelques lignes de l'auteur que l'on saisit tout de suite l'évidence d'un style.
L'on y trouve aussi un humour subtil teinté d'humanité et de nostalgie.
Extrait : "En coupant le contact de la voiture garée tout près du quai Lombard, mon père passa sa main sur son visage et dit : "Quel drôle de voyage." Ma mère ouvrit la porte passager et regarda vers le fleuve. Étrangement, malgré l'heure et les impédimenta de ce voyage harassant, ni l'un ni l'autre ne semblait pressé de quitter cette voiture pour retrouver l'ordinaire de leurs vies, préférant prolonger encore un peu cette impression de complicité qui les avait unis tout au long de l'interminable trajet, se relayant derrière le volant pour parvenir ensemble à terminer une oeuvre commune, revenir au pied de leur appartement, dont chacun redoutait secrètement qu'un jour ou l'autre, la porte palière ne claque à nouveau."
Pour conclure, je dirai que le titre correspond bien à l'éthique du personnage principal...
Bonnes et belles lectures
J-C Togrège
13/12/2019
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