jeudi 28 juin 2018

LIVRE /// LA TRISTESSE DES ANGES - JON KALMAN STEFANSON : un livre à lire à voix haute !

LA TRISTESSE DES ANGES
JON KALMAN STEFANSON


Voilà un livre qui convient parfaitement à la lecture à voix haute, pratique que j'ai découverte depuis ma plongée dans l'œuvre de Proust. Ah non, ce n'est pas possible, pensez-vous, il va encore nous reparler de Proust... Que voulez-vous, il y a des auteurs qui marquent par leur singularité et leur talent et auxquels l'on repense. Le type de rencontre où il y a un avant et un après. Mais revenons à notre sujet.

Lire à haute voix, c'est une façon de s'approprier davantage les mots utilisés, de les sentir dans sa bouche, d'en goûter la sonorité, l'art de leur agencement dans les phrases. 

Pour qui lit vite, ce qui est mon cas, cette forme de lecture permet également de ralentir sa cadence, de mieux goûter au style de l'écrivain et de s'imprégner du rythme de l'écriture.


Lire à haute voix, c'est comme regarder un film sur grand écran !

Un film mal réalisé, autant ça peut passer en le regardant à la télé, pour autant qu'un jeu d'acteur ou une histoire captive notre attention, autant ça ne passe pas sur grand écran. Cela saute tellement aux yeux que c'est bâclé, que c'en est à se demander s'il y avait quelqu'un derrière la caméra ! J'ai remarqué que nombre de comédies tombaient dans ce travers du "filmé vite, sans art", comme si donner dans le comique était un sous-genre, ce qui est une absurdité. Regardez-donc les grands films de Chaplin !

Eh bien, c'est pareil pour un roman. Essayez donc de lire un texte mal écrit, les mots tomberont à plat une fois que vous les prononcerez. Le vide du texte vous apparaîtra comme une évidence.

"La Tristesse des anges" est la suite de "Entre le ciel et la terre" qui fut déjà pour moi un éblouissement. Je vous avais dit alors tout le bien que j'en pensais dans une autre chronique (*).

Quelle chance, car ce deuxième roman publié en France est tout aussi excellent. L'on s'y délecte de nouveau de cette langue très belle, pleine de poésie et chargée de réflexions sur le sens de la vie, qui prend toute son ampleur à voix haute. Comment vous dire ? C'est simplement beau à dire et à entendre.

Pour ce qui est du récit, nous retrouvons "le gamin" après la mort de son ami Bàrour. Cette fois-ci, il va affronter la neige dans cette Islande du XIXème siècle, en accompagnant un "facteur" homme bourru et silencieux, porteur du courrier dans un environnement dangereux et glacial.

Extraits : "Le gamin se lève précautionneusement, il n'est pas certain que ses jambes fatiguées parviendront à le soutenir, mais elles le font, l'assurance du repos qu'elles connaîtront bientôt leur donne de la force, il jette un œil de côté en arrivant à la porte, regarde les étagères pleines de livres et de mots qui ont le pouvoir d'ouvrir sur des mondes nouveaux, des cieux nouveaux, tandis que les yeux de Kjartan se perdent dans la nuit. Il est toujours possible de connaître un homme à ce sur quoi ses yeux se portent. Je croyais, déclare le gamin, trop assommé de fatigue pour être timide, qu'on ne pouvait pas être malheureux entouré d'une telle quantité de livres. Kjartan tourne la tête vers lui et le fixe longuement mais il ne répond rien."

"Par deux fois, il cède à la tentation d'avaler quelques flocons pour se désaltérer, mais cela ne fait décupler sa soif, il se laisse également à se parler et à se réciter quelques vers, car il est dans la vie de chaque homme des moments où seules quelques lignes de poésie peuvent lui permettre de s'orienter : d'une manière incompréhensible, certains vers renferment en leur profondeur à la fois l'essence, le bon sens, la route à suivre, la résignation face au monde et ce, même si le poète qui les a composés a passé sa malheureuse vie perdu au creux de la paume d'un géant. Mais les rimes se brisent en mille morceaux sur ses lèvres gercées par le froid, elles se disloquent également dans sa tête. (...)

Bonnes et belles lectures estivales.

JC Togrège
28/06/2018


* Ma chronique précédente : http://leschroniquesdejctogrege.blogspot.com/2017/02/lecture-entre-ciel-et-terre-de-jon.html

lundi 18 juin 2018

LE LIVRE N'A PAS PERDU SON POUVOIR DE SEDUCTION

LE LIVRE N'A PAS PERDU SON
POUVOIR DE SEDUCTION



D'après le livre "Masques"


Période de juin, celle où en tant que lecteur de  "Lire et faire lire", j'ai remis aux enfants ayant suivi mes séances de lecture à l'école un livre offert par l'association.

Une autre condition était d'avoir participé à l'opération "un enfant un livre" dont le thème était cette année la peinture. Les photos illustrant cette chronique correspondent aux réalisations des classes faites dans ce cadre.

Pour les élèves en Elémentaire, ce fut un petit roman et pour ceux de Maternelle un album illustré. J'y avais ajouté un petit poème, ayant choisi l'un de ceux qu'ils avaient le plus apprécié lors de mes débuts et fin de séance.





Et alors quelle joie de voir tous ses visages radieux à l'idée de recevoir un livre qui comme certains m'ont dit serait à eux "pour toute la vie" !

Dès la distribution faite, chacun se plongea dans son livre, ravi d'en découvrir le contenu.

En tant que "semeur de petites graines de lecture", j'avoue avoir été touché.

Notre époque a beau être celle du tout écran, tablette et ordinateur, le livre n'a pas perdu son pouvoir de séduction. Les sourires éclatants de tous les enfants en étaient la preuve !

Le rapport tactile qu'on peut avoir avec un si bel objet ne sera jamais comparable avec la lecture froide sur écran. Le toucher du papier, c'est incomparable comme sensation.

Certes, en grandissant, certains s'éloigneront de la lecture pendant quelque temps, mais mon pari c'est qu'ils y reviendront un jour ou l'autre. Ce serait si dommage de se priver de l'un des grands plaisirs de l'existence.

Et puis, peut-être se souviendront-ils de la formule que je leur répétais régulièrement: "Les livres sont nos amis pour toute la vie !".

Bonnes et belles lectures !

JC Togrège
18/06/2018




Travail réalisé d'après "Bob l'artiste""


Dessins inspirés par "Musette Souricette"



mercredi 13 juin 2018

MUSIQUE /// LA CHEF D'ORCHESTRE

La Chef d’orchestre
de Zahia Ziouani


Dans ce récit autobiographique, Zahia Ziouani raconte son parcours peu banal, son amour de la musique et de la direction d’orchestre, son désir de faire découvrir la musique classique au plus grand nombre.

Peu banal son parcours, car elle a grandi dans une HLM du 93 (Seine Saint Denis) au sein d’une famille mélomane mais non musicienne. Adolescente, elle avait au mur de sa chambre des posters de chef d’orchestre, preuve s’il en faut qu’il n’y a pas que le Rap  à pouvoir s’épanouir en banlieue.


Elle raconte ses années de conservatoire avec sa sœur,  ses rencontres avec ce qu’elle nomme de « belles personnes » qui lui ont fait confiance et lui ont permis de se révéler et d’accomplir son rêve. A son tour, elle veut faire découvrir la musique classique aux jeunes de tout horizon et leur faire comprendre que leur vie est entre leurs mains, qu’il est possible de réussir sa vie pour qui s’accroche et travaille.

Extrait :  ... Et si un élève ne se présente pas aux cours régulièrement, sans raison, ou bien s’il ne travaille pas suffisamment, je rencontre les parents pour leur rappeler ce que nous attendons de leurs enfants mais aussi d’eux, car ils ont un rôle non négligeable à jouer. La musique permet à l’enfant d’être autonome dans son travail, avec son instrument...sauf qu’à huit ans, un enfant ne prendra pas de lui même son violon pour jouer à la maison. Or, la pratique quotidienne est très importante ; c’est elle qui conditionne la réussite. L’accompagnement des parents est donc nécessaire et la fameuse phrase « N’oublie pas ton instrument » indispensable ! 

Alors qu’elle a déjà enseigné dans les beaux quartiers de Paris et qu’elle est reconnue dans le milieu musical, (en 2008, elle est promue Chevalier de l’Ordre national du mérite de la République française)  elle a installé son orchestre en Seine Saint-Denis et y est également Directrice d’une Ecole de danse et de musique. Cette fidélité à ses origines en rend son récit encore plus intéressant et sincère quant à ses objectifs de vie.

Elle est aussi Chef d’Orchestre principal de l’Orchestre symphonique national d’Algérie depuis 2007, car  la musique n’a pas de frontière.

Bien sûr, elle y évoque également sa grande passion pour la Direction d’orchestre, son interprétation des œuvres et ses relations de travail avec les musiciens.
Extrait : " Il n’empêche, quelle que soit son intervention, le chef d’orchestre reste à mes yeux au service de la musique ; ce n’est pas la musique qui se met au service de du chef pour valoriser son ego". "(...) Car la musique est un échange et un partage. Il ne s’agit pas de « jouer pour jouer » ou d’établir une performance technique, mais bien tout d’abord de s’approcher de ce que souhaitait le compositeur et ensuite de prendre plaisir à jouer ensemble afin de toucher le public, même profane, et de partager les œuvres avec lui. »

Musicalement vôtre
JC Georget

mardi 12 juin 2018

CINE /// L'EXTRAORDINAIRE VOYAGE DU FAKIR : un film plein de fantaisie qu'on regarde le sourire aux lèvres

L'EXTRAORDINAIRE VOYAGE DU FAKIR
DE KEN SCOTT

avec Dhanush, Bérénice Béjo, Erin Moriarty, Barkehad Abdi, Gérard Jugnot


Nous suivons les tribulations à travers le monde d'un jeune Indou très sympathique, dynamique et toujours plein de ressources.

Alors qu'il devait se rendre au rencard de sa vie, il s'endort dans une armoire Ikea qui part pour une livraison lointaine. Quelle ne sera pas sa surprise à son réveil ?

 Et c'est là que commencera son extraordinaire voyage...

Un film qu'on regarde tout du long avec un grand sourire aux lèvres !






Ce récit sous forme de fable romantique est tiré du roman de Romain Puertolas qui connut un grand succès.

C'est frais, poétique, plein de fantaisie, romantique et super positif, le tout entrecoupé de séquences musicales ou dansantes. J'ai particulièrement aimé la danse pétillante de Bérénice Béjo et Dhanush à laquelle il est difficile de résister. Si vous sentez vos pieds battre la mesure, pas d'inquiétude, c'est normal !

Certes, certains pourront dire qu'on baigne dans les bons sentiments, dans le bonbon acidulé !

Mais comme c'est bien fait, bien réalisé, que la musique est bonne et que cela n'empêche pas d'aborder certains sujets d'actualité tels que l'immigration et la Lybie, ce serait dommage de faire la fine bouche. Et puis quel tonus il a Dhanush, et quel sourire contagieux !

Au final, c'est un film qui fait du bien au moral et duquel l'on sort heureux.

Cinéphilement vôtre.

JC Togrège
12/06/2018




samedi 9 juin 2018

14/18 /// PUTAIN DE GUERRE! -LE DERNIER ASSAUT : spectacle-concert de Tardi, Dominique Grange et Accordzéam

PUTAIN DE GUERRE ! - LE DERNIER ASSAUT - 
 
 
 
 
A partir des albums de bandes dessinées de Jacques Tardi consacrés à la 1ère guerre mondiale, il a été conçu un spectacle-concert : "Putain de guerre ! - Le dernier assaut".
 
Ce spectacle de grande qualité musicale, visuelle et littéraire est une charge réussie et efficace contre cette grande boucherie que fut 14/18.
 
 
 
   
En alternance, il y a des lectures de Jacques Tardi à partir de ses livres et des chansons interprétées par Dominique Grange  qui est accompagnée par les musiciens d'Accordzéam. Des dessins de l'auteur sont également projetés sur grand écran ce qui ajoute au réalisme des chansons.
 
L'on y retrouve des classiques telles que "la chanson de Craonne" et "la grève des mères" mais aussi des compositions récentes en écho à des scènes décrites par Jacques Tardi.
 
Il en résulte pour le spectateur une émotion intense face au calvaire vécu par les Poilus et un sentiment de révolte face à un haut commandement scélérat et incompétent. C'est la voix du petit peuple que l'on entend, celui qui fut réduit à de la chair à canon.
 
Ce spectacle donne envie de se replonger dans les BD de Tardi dont le graphisme et les textes sont exceptionnels.


 


 
 
 
 
 
 JC Togrège
09/06/2018
 
PS Ceci me permet de rendre hommage à Marc Ogeret décédé le 4 juin 2018 avec son interprétation de " la chanson de Craonne" :  https://www.youtube.com/watch?v=wGrdG85mmL0

vendredi 1 juin 2018

UNE LIBRAIRIE QUI FERME, C'EST BIGREMENT TRISTE !

UNE LIBRAIRIE QUI FERME, 
C'EST BIGREMENT TRISTE  !


La grande librairie indépendante du centre-ville de Reims vient de fermer ses portes, et je suis triste.

Certes, vous me direz que des magasins qui ferment, c'est quelque chose de courant, de banal. Bien sûr, mais une librairie, ce n'est pas une boutique comme une autre, c'est un lieu extraordinaire qui fait se rencontrer des livres et des lecteurs.

C'est un lieu où travaillent des passionnés du livre toujours prêts à échanger avec les clients, toujours là pour guider et favoriser la rencontre entre un auteur et un lecteur. Le libraire n'est pas un simple vendeur, c'est d'abord un amoureux de littérature !

Se promener dans une librairie, c'est quelque chose de spécial qui n'a pas grand chose à voir avec l'acte de consommation. Y aller, même en ayant en tête un titre, c'est savoir qu'on va en sortir avec peut-être celui qu'on cherchait mais sans doute avec d'autres.

L'on n'arpente pas une librairie comme les allées du supermarché, l'on feuillette des livres, l'on va d'un rayon à un autre puis on y revient, l'on est séduit par une tournure de phrase d'un auteur, l'on repense à un autre qu'on n'a pas lu depuis longtemps, l'on est attiré par le petit mot "coup de cœur" du libraire, en somme l'on flâne, l'on se trouve dans une bulle où les mots sont rois.

Et puis, dans les vraies librairies (en opposition à ces autres lieux où l'on se contente de vendre les best-sellers à la pelle), vous remarquerez qu'il n'y a pas de bruit ou très peu. Non seulement, l'on n'est pas perturbé par une musique d'ambiance aseptisée, mais les promeneurs sont calmes, posés, attentifs.

Comment vous dire la sensation de bien-être à se trouver dans un tel lieu, qui n'a rien à voir avec le simple fait de cliquer chez soi sur un site internet pour valider un achat ? D'un côté, c'est se trouver dans un lieu apaisant qui abrite et fait vivre les mots, de l'autre c'est un acte froid et déshumanisé...

Une librairie qui ferme, c'est bigrement triste !

JC Togrège
02/06/2018