samedi 25 février 2023

LIVRE /// DALVA DE JIM HARRISON

DALVA

JIM HARRISON

                                                                                                                  


 En premier lieu, je dirai que ce roman est foisonnant avec mille détails et anecdotes qui parsèment le récit. Ici, il faut prendre son temps avec un style de grande qualité qui n'est pas commun, avec de belles descriptions de la nature et des grands espaces.

Et puis, il y a de nombreux personnages, ce à quoi nous ne sommes plus guère habitués, notamment dans la production française. Alors, un conseil, notez les sur une feuille avec les liens entre les uns et les autres. Pour ne pas l'avoir fait de suite, j'ai dû lire une seconde fois la première partie car j'étais perdu dans le qui est qui et avec qui.

Que cela ne vous décourage pas, car il s'agit ici de ce que l'on peut appeler de la grande littérature. C'est riche, c'est poignant, cela interpelle également.


Mais me direz-vous de quoi parle ce livre ? 

J'y vois un livre d'introspection de Dalva. Alors âgée de 45 ans, cette femme de caractère se penche sur son passé, tout particulièrement sur le bébé qu'on l'a forcée à abandonner. Une idée la hante, qu'est-il devenu cet enfant qu'elle a eu avec Duane, l'amour de sa jeunesse, son grand amour ? Est-il devenu un homme équilibré et heureux ? Où est-il ? Comment le retrouver ? Le temps qui passe n'apaise pas sa douleur.

Un autre thème que j'ai beaucoup aimé est celui qu'il faut bien appeler le génocide des Indiens par les colons européens venus s'emparer de leur territoire. Pour cela, nous avons accès aux carnets de souvenirs écrits par son arrière grand-père qui était missionnaire auprès des Sioux. Il y a les massacres (enfants inclus), mais aussi l'anéantissement des troupeaux de bisons si essentiels pour la vie des Indiens, les traités bafoués, les déplacements, la sédentarisation d'un peuple qui aimait tant bouger. Tout fut fait pour les faire disparaître, sans aucun état d'âme. Dalva y est d'autant plus sensible que son grand-père épousa une indienne Dakota. 

Un chiffre significatif qu'évoquait Jim Morrison est fort parlant : "A notre arrivée sur le continent, les Indiens étaient au moins cinq millions, et en 1890 il restait à peine deux cent mille de ces premiers habitants de l'Amérique."

Comme tout roman de cette puissance, il y a plein d'autres sujets à découvrir.

Bonne lecture !

J-C Togrège
25/02/2023

jeudi 16 février 2023

CINE /// TIRAILLEURS : J'en attendais beaucoup

 TIRAILLEURS
DE MATHIEU VADEPIED
avec Omar Sy, Alassane Diong, Jonas Bloquet


Eu égard aux éloges tressés par la Presse, j'en attendais beaucoup.

A la façon dont Omar Sy en fit la promotion, je m'attendais à un grand film qui m'emporterait.

Parler du rôle des tirailleurs sénégalais (qui n'étaient pas tous du Sénégal, loin s'en faut) me semblait une très bonne idée, car c'est assez peu raconté dans nos livres d'histoire.

J'en attendais sans doute trop !


Parmi les très bonnes choses du films, il y a les deux grands thèmes que sont le rôle des soldats africains dans la 1ère guerre mondiale, ainsi que le rapport père/fils. Un père s'engage dans l'armée pour veiller sur son fils enrôlé d'office, qui devient son supérieur dans le régiment. Le premier ne pense qu'à sauver leur peau et rentrer au pays tandis que le second se laisse séduire par ses galons.

Notons aussi que les acteurs jouent très bien.

Cependant, le film manque de souffle, de rythme, c'est très lent, cela s'enlise au point que j'ai failli m'endormir dans sa première partie, tout comme ma voisine. Je n'ai pas réussi à entrer en empathie avec les personnages ou à me passionner pour l'histoire.

Et puis, même si je ne suis pas un spécialiste de cette période, certaines scènes ne m'ont semblé pas assez réalistes : les soldats évoluent de nuit dans le no man's land sans guère de problème. N'y avait-il pas des fusées lumineuses pour surveiller l'ennemi ?

Je n'ai pas beaucoup vu de baïonnettes lors des assauts, le casque n'est pas toujours porté.

Ce n'est pas pour autant un mauvais film, mais j'en attendais davantage.

Cinéphilement vôtre.

J-C Togrège
16/02/2023



mardi 14 février 2023

DES MOTS D'AMOUR VIEUX D'UN SIECLE

 DES MOTS D'AMOUR VIEUX D'UN SIECLE



Je vais vous parler de cartes postales exhumées de mon grenier et qui ont été écrites entre 1923 et 1925. 

De celles-ci surgissent de jolis mots d'amour entre Marie et Albert. Les lire, c'est un peu les faire revivre, refaire briller leur passion.

Marie demeurait à Epernay dans sa famille et avait un emploi de bureau, tandis qu'Albert était en garnison à Metz. Il appartenait au 28ème régiment des Dragons.

Ils ne se voyaient que pendant les permissions d'Albert. Pour combler le manque, les fiancés avaient décidé de s'écrire tous les jours, car dans les années 1920 c'était le seul moyen de rester en communication.

Alors ils s'écrivirent, alternant les longues lettres et les cartes postales, s'alarmant lorsqu'ils restaient sans nouvelles plusieurs jours



Les cartes étaient choisies avec soin dans un style très romantique. Les lettres ont disparu, peut-être brulées par Marie peu de temps avant son décès, afin de protéger l'intimité de son couple. 

C'est sans doute mieux ainsi, car il y a quelque chose d'un peu impudique à lire une correspondance d'amoureux.

Mais il me reste toutes ces cartes postales, plus de 200 au total.


Sur le recto de certaines cartes, l'on peut lire des phrases telles que :

" Echangeons nos deux cœurs dans un divin baiser."
" L'émoi de ton baiser envahit tout mon être, et sa douce chaleur jusqu'à l'âme pénètre."
" Parmi les souvenirs dont mon cœur garde trace, celui de ton baiser tient la première place."

Cela permettait parfois à Albert d'y ajouter un commentaire : "Je pose un baiser sur la croix". (voir ci-contre)



Plus d'un siècle plus tard, ces mots d'amour conservent leur charme. Certains m'ont touché par leur profondeur et l'attachement qu'ils se vouaient l'un à l'autre.

Les petits noms qu'ils se donnaient m'ont fait sourire :

Marie pour Albert : mon ange adoré, mon fiancé chéri, ma caille adorée
Albert pour Marie : mon ange joli, ma petite caille, mon amour bien aimé, ma mignonne Pérette, 

Quant aux jolies phrases, je ne trahirai pas Marie et Albert et les garde pour moi dans le secret d'un album…



J'y ai trouvé aussi du vocabulaire plus guère utilisé de nos jours. 

Ainsi en est-il du mot "bécot", de l'expression "je te fais un bec" (pour je t'embrasse) ou de "cafard" utilisé pour dire leur grande tristesse d'être séparés.

L'un et l'autre vivaient dans l'attente d'une permission pour se rejoindre.

Leur patience fut récompensée puisqu'ils se marièrent le 29 juin 1925, lui avait 22,5 ans et elle 23 ans.

Longtemps après le décès de son époux survenu en 1958, Marie parlait encore de lui et évoquait le jour où elle le rejoindrait.



L'on dit souvent que les morts survivent 100 ans, tant qu'ils restent dans le souvenir familial, génération après génération, jusqu'à ce que plus personne ne se souvienne d'eux. Par cette chronique, j'ai fait revivre l'histoire d'amour de ma grand-mère et de mon grand-père.




Bonne Saint Valentin à tous les amoureux !

J-C Togrège
14/02/2023




lundi 13 février 2023

L'ARBRE EST ABATTU CAR SES FEUILLES TOMBENT EN OCTOBRE

 L'ARBRE EST ABATTU CAR SES FEUILLES TOMBENT EN OCTOBRE



Quelle ne fut pas ma colère ce matin en lisant dans mon quotidien un article intitulé "L'abattage d'un arbre met le maire en colère" !

Il s'agit d'un maire rural qui s'indigne que le seul arbre se trouvant dans l'école de son village ait été coupé au motif que les feuilles tombent en octobre. 

Il est vrai que les maires ne font plus ce qu'ils veulent depuis la mise en place des grandes communautés de communes.


Dans ce cas précis, les villages sont rattachés à une grande ville qui ne brille pas pour son amour des arbres. Je n'en dirai pas plus, le but n'étant pas de polémiquer mais de m'indigner.

J'ai déjà connu cela il y a quelques années lorsque le pôle scolaire de mon village fut reconstruit. Les quelques arbres à proximité avaient été coupés. J'avais rencontré le "donneur d'ordres" de l'époque qui m'avait expliqué que les feuilles salissaient les murs. 

J'avais alors écrit un texte en réaction : "Arbre banni"
Il figurera dans mon prochain recueil à paraître : "Les bourgeons renaîtront"


Aucun arbre dans l'école toute neuve
Monsieur a dit que cela salissait les murs
Toutes ces feuilles tombant de la ramure.
N'y a-t-il que l'oiseau qui s'en émeuve ? 

Cour de récréation bétonnée, aucun tronc
Où s'adosser, rêveur, l'esprit vagabond.
Les jeunes mains n'y feront pas de ronde
L'on nous façonne là un curieux monde.

Le bâtisseur a trahi l'enfant qu'il fut
Qui s'émerveillait devant tout Feuillu
La sentence est tombée, l'arbre est banni.

Plus d'ombre quand le soleil martèle
Plus d'abri quand la pluie crécelle
Plus de chants d'oiseaux qui étincellent !

Et voilà pourquoi, nos cours d'école ont maintenant une pelouse synthétique sans aucun arbre.

J-C Togrège
13/02/2023

jeudi 2 février 2023

LIVRE /// TROIS JOURS AVEC NORMAN JAIL DE ERIC FOTTORINO

TROIS JOURS AVEC NORMAN JAIL
ERIC FOTTORINO



C'est çà qu'il y a de bien avec la lecture ! Même quand on a beaucoup lu, l'on tombe toujours sur une pépite inattendue, comme ce livre prêté par une amie. 

Un livre qui sait être différent et nous emmener là où l'on ne s'y attend pas, l'esprit titillé.

Même si je connaissais déjà cet auteur, notamment par "Caresse de rouge", ici je dois dire que la surprise fut au rendez-vous.

Clara, jeune étudiante en littérature, rencontre un auteur qui n'a publié qu'un seul livre dans les années 1940 (il eut un succès d'estime mais n'est plus disponible) tout en ayant continué d'écrire toute sa vie. Alors que réputé peu ouvert, l'auteur va s'ouvrir à son interlocutrice et lui dire combien l'écriture compte pour lui. 


Il raconte alors son processus de création, son exigibilité, ses doutes, et l'on s'aperçoit que cet homme a d'abord vécu pour écrire, faisant passer sa vie personnelle bien après. D'ailleurs sa bibliothèque est pleine de ses manuscrits.

De nombreuses questions se posent :

Qu'est-ce qu'un écrivain ?
Est-ce une façon de vivre différente ? 
Faut-il publier pour être considéré comme tel ? 
Ecrire sans être lu ? Pour qui alors ? 

Et puis tournant dans le récit, il y en aura d'autres, Norman Jail fait lire à Clara l'un de ses romans qui ne comporte que des chapitres 1. Jamais content de lui, il l'a refait sans cesse en le modifiant, le peaufinant, le développant. Malgré cela une histoire se dessine et l'on s'y laisse prendre.

La fin du roman sera à la hauteur, avec encore une chausse-trappe littéraire.

Je ne terminerai pas sans insister sur la qualité de l'écriture littéraire d'Eric Fottorino.

Vous l'aurez compris, ce fut un véritable coup de cœur !

Bonne lecture

J-C Togrège
02/02/2023