vendredi 27 janvier 2017

LIVRE /// TRAFIC D'OR /// Policier


TRAFIC D'OR
DE ROBERT VAN GULIK


Parallèllement à ma lecture de Proust (je viens de finir le 1er tome des "Demoiselles en fleur"), j'explore ma PAL se trouvant à côté de mon lit.

Certains livres y sont depuis des années attendant...

C'est le cas de "Trafic d'or", roman policier dont l'auteur ne me disait plus rien du tout.
Je n'arrive même pas à me souvenir si c'est un achat que j'ai effectué ou un cadeau. Petit format de poche, il servait à tenir une pile, incognito. Je l'ai sorti de son oubli et bien m'en fit.

Le juge Ti est un personnage récurrent, un juge de 33 ans qui entre en fonction dans une province de la chine impériale de la dynastie des T'ang au VIIème siècle. Il est chargé de faire régner la justice et de résoudre les litiges et enquêtes. Pour ce faire, il est épaulé de deux anciens membres des chevaliers des vertes forêt, autrement dit des brigands de grand chemin détrousseurs de voyageurs, qu'il rencontre dans ce premier récit.

 Autant dire que le dépaysement est total pour le lecteur qui découvre les us et coutumes d'un pays et d'une époque. Cela m'a fait penser aux romans d'Ellis Peters, avec son moine Cadfaël, toujours prompt à mener une enquête dans l'Angleterre du XIIème siècle.

Dans les deux cas, grâce à ces romans policiers, nous découvrons une organisation sociale et la façon de vivre et de penser d'hommes ayant vécu à des siècles de nous. Outre des récits bien menés, des personnages intéressants, une fluidité dans l'écriture, c'est une façon de s'instruire tout en s'amusant. Certes, cela ne peut fonctionner que si les auteurs sont bien documentés, ce qui est le cas des deux auteurs cités. J'avoue une préférence pour Ellie Peters que je recommande bien vivement.

Robert Van Gulik était ce qu'on appelle un sinologue érudit. Il pouvait aussi bien publier des ouvrages très sérieux sur la Chine (la peinture par exemple) qu'écrire des romans policiers (16 au total). Il avait également traduit des romans chinois desquels il a respecté le fait  d'introduire trois enquêtes par livre, enquêtes qui peuvent se croiser, interférer ou pas du tout.

Autant dire qu'il n'y a pas d'anachronisme ou d'inexactitude dans sa description de cette Chine. Nous y découvrons aussi l'antagonisme entre les adeptes de Confucius et ceux de Bouddha.

Extrait :

"Le juge tirailla pensivement sa moustache. Au bout d'un moment, il dit :
- Ce serait stupide de ma part de nier l'existence de phénomènes surnaturels. N'oublions pas que notre Maître Confucius lui-même gardait une grande réserve quand ses disciples le questionnaient à ce sujet. Mais d'un autre côté, je crois qu'il faut d'abord chercher si les faits ne peuvent pas s'expliquer de façon rationnelle.
Le sergent Hong secoua la tête
- Ils ne le peuvent pas, Votre Excellence, s'écria-t-il. La seule explication, c'est que le défunt est privé de repos dans l'autre monde parce que son meurtre n'a pas été vengé dans celui-ci On a déposé son corps dans le temple bouddhique, et tant que la décomposition n'est pas trop avancée, un mort peut se manifester aux personnes qui se trouvent à proximité du cadavre

Bonne lecture

JC Togrège
27/01/2017

vendredi 20 janvier 2017

CINE /// SULLY

 
SULLY
DE CLINT EATSWOOD
 

Avec Tom Hanks, Aaron Eckhart, Laura Linney

Encore une fois, Clint Eastwood nous livre un grand film dans une veine classique qu'il maîtrise totalement. Tout est bien monté, rigoureux, tout est bien filmé, net, bien cadré et pas de scènes inutiles.

Un film classe et démonstratif !

Pas de scènes inutiles, alors que l'histoire est réelle et connue : le 15 janvier 2009, un pilote évite un crash grâce à son sauf froid et à son expérience, et sauve ainsi la vie des 155 passagers de son avion en amerrissant sur le fleuve Hudson.

Alors que la presse le célèbre comme un héros, une commission d'enquête à charge est nommée. L'on comprend vite que cela arrangerait beaucoup d'intérêts qu'il soit reconnu responsable de la perte de l'appareil. Pour lui, ce serait la fin de sa carrière et de sa réputation auxquels s'ajouteraient de graves soucis financiers.

Tom Hanks, qui joue le rôle du pilote, est d'une sobriété et d'une justesse impeccables. Ce n'est pas un homme qui se voit en héros, il considère qu'il a simplement bien fait son travail. Par contre, les arguments de la commission le tourmentent. Et s'il avait réellement pris une mauvaise décision, et si finalement il avait risqué la vie des passagers ?

Les doutes de l'homme, les méandres de ses réflexions, son cheminement dans sa défense sont captivants.

Autre pari réussi du film, c'est d'aborder l'aspect technique de façon claire et didactique pour que nous spectateurs, nous ne soyons pas perdus. Cela nous permet de comprendre les reconstitutions effectuées et leurs enjeux.

Film démonstratif aussi en ce sens que le réalisateur s'en prend au tout électronique, tout informatique nous rappelant qu'il ne faut pas oublier l'essentiel, c'est à dire l'humain et ce qui est irremplaçable, son expérience.


Cinéphilement vôtre

JC Togrège
20/01/2017







dimanche 15 janvier 2017

LIVRE /// DANIEL PENNAC


DANIEL PENNAC ET MALAUSSENE
Quel plaisir que l'émission de la Grande Librairie avec Daniel Pennac pour nous parler du retour de Benjamin Malaussène après 17 ans d'absence ! Comme cela donne envie de se jeter sur son dernier livre " le cas Malaussène tome 1 : ils m'ont menti" !
Quelle jubilation à voir cet auteur entouré de personnalités aussi intéressantes que Lambert Wilson (qui lut un extrait d'un monologue d'un escroc de la finance, personnage du roman), de Christian Bobin (qui sait toujours dire les choses avec poésie " Un livre heureux est un livre qui sait nous entendre.") de Carol Beffa (compositeur qui sait improviser sur des lectures), de Sylvia Avallone (romancière italienne plein d'énergie) !
Quelle saveur à l'entendre énoncer ce qui pourrait être son 11ème droit imprescriptible du roman : "Le droit de s'endormir sur une lecture qu'on admire" !
Si je mets tant de points d'exclamation, c'est émission était jubilatoire et donnait envie de lire, encore et toujours !
 Voici ci-dessous ma chronique de juillet 2015 sur Daniel Pennac.
Bonne et belle lecture
JC Togrège
15/01/2017
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Suite rencontre de lecteurs, une personne du groupe énonça sa déception après avoir lu « Chagrin d’école » de Daniel Pennac, en ajoutant qu’elle aimait beaucoup d’autres de ses livres. 

Cette remarque venant d'une enseignante m’étonna, car comme l'on sait, ce livre est celui d’un ancien professeur et que je pensais cette population plutôt acquise à ce type d’ouvrages.

Et puis, de mon côté, j’en avais gardé un excellent souvenir. 


Aimant beaucoup le style et l’univers de Pennac, je me suis replongé dans  « Chagrin d’école » et la magie opéra de nouveau. 

Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est son meilleur ouvrage (« Roman » reste la référence, ainsi que la série des Malaussène), mais j’ai de nouveau beaucoup aimé. Sans doute car il aborde tous ses livres par un angle différent des autres, et pour celui-ci, à partir de sa cancrerie. Attention, pas une cancrerie qu’il revendique comme positive mais comme une souffrance.


Extrait :
« ...C’est d’ailleurs le lot du cancre : on ne le croit jamais. Pendant sa cancrerie on l’accuse de déguiser une paresse vicieuse en lamentations commodes : « Arrête de nous raconter des histoires et travaille ! » 

Et quand sa situation sociale atteste qu’il s’en est sorti on le soupçonne de se faire valoir : « Vous, un ancien cancre ? Allons donc, vous vous vantez ! »

Le fait est que le bonnet d’âne se porte volontiers a posteriori. C’est même une décoration qu’on s’octroie couramment en société. Elle vous distingue de ceux dont le seul mérite fut de suivre des chemins du savoir balisé. 

Le gotha pullule d’anciens cancres héroïques. On les entends ces malins, dans les salons, sur les ondes, présenter leurs déboires scolaires comme des hauts faits de résistance. Je ne crois, moi, à ces paroles que si je perçois l’arrière son d’une douleur. Car si l’on guérit parfois de la cancrerie, on ne cicatrice jamais tout à fait des blessures qu’elle nous infligea.

Cette enfance-là n’était pas drôle, et s’en souvenir ne l’est pas davantage. Impossible de s’en flatter. Comme si l’ancien asthmatique se vantait d’avoir senti mille fois qu’il allait mourir d’étouffement ! 

Pour autant, le cancre tiré d’affaire ne souhaite pas qu’on le plaigne, surtout pas, il veut oublier, c’est tout, ne plus penser à cette honte. Et puis il sait, au fond de lui , qu’il aurait fort bien pu ne pas s’en sortir. Après tout, les cancres perdus à vie sont les plus nombreux. J’ai toujours eu le sentiment d’être  un rescapé. »


 Je n’ai pas été cancre mais rêve encore parfois que je repasse le BAC avec toutes les angoisses que cela suppose quand on a fait une année un peu en dilettante, ce qui fut mon cas en Terminale... 


Comme il s’en est sorti, en tant que professeur, il fit tout pour aider les élèves les plus en difficulté. Il aura eu des réussites et aussi des échecs, mais toujours avec la fougue nécessaire pour faire son job (tel un sacerdoce) le mieux possible, quitte à utiliser des méthodes peu orthodoxes. 

A la fin du livre, il utilisera cette formule pour résumer son combat : sortir du coma scolaire une ribambelle d’hirondelles fracassées.


 On a tous en mémoire des enseignants qui nous ont marqué, je pense que Pennac a dû en marquer plus d’un !


 J’ai poursuivi cette lecture en restant dans l’univers de cet écrivain, d’abord en regardant une adaptation cinématographique réussie de son roman « Au bonheur des Ogres ». 

J’y ai retrouvé  dans ce film de Nicolas Bary, son côté faussement « foutraque », son rythme et tous les personnages bien loufoques de la famille Malausséne. Il y a bien quelques changements dans le scénario mais l’esprit de Pennac demeure bien présent : de la loufoquerie, des situations hors norme, un humour tout en parlant de situations tragiques, un ton décalé. Comme dans les livres, tout s’enchaine, pas le temps de s’ennuyer. Ce film est plein de charme ! 


 Pour moi, Raphaël Personnaz restera ce Malaussène dont la profession est d’être « bouc émissaire » sous le couvert de « contrôleur technique »


Extrait : 


« Je lui explique alors que la fonction dite de Contrôle technique est absolument fictive. Je ne contrôle rien du tout, car rien n’est contrôlable dans la profusion des marchands du temple. A moins de multiplier par dix les effectifs des contrôleurs. 

Or donc, lorsqu’un client se pointe avec une plainte, je suis appelé au bureau des Réclamations où je reçois une engueulade absolument terrifiante. 

Mon boulot consiste à subir cette tornade d’humiliations, avec un air si contrit, si paumé, si profondément désespéré, qu’en règle générale le client retire sa plainte pour ne pas avoir mon suicide sur la conscience, et que tout se termine à l’amiable , avec le minimum de casse pour le Magasin : Voilà. Je suis payé pour ça. Assez bien, d’ailleurs. »


 Si je vous cite cet extrait, c’est que je me suis relancé dans la lecture des romans mettant en scène cette famille très atypique des Malaussène. J’ai redévoré le 1er, à savoir « Au bonheur des ogres » et viens d’entamer « La fée carabine ».


 Dans cette famille de fous-dingues-gentils, l’on y trouve, pour n’en citer que quelques uns :


 Benjamin : Il est chargé de famille, en ce sens qu’il s’occupe de ses frères et sœurs tandis que sa mère part en voyage pour des histoires d’amour. Elle sait que c’est  « un bon fils » et qu’il pourvoira aux besoins de sa fratrie, d’où ce métier de « bouc émissaire » car il faut bien payer les factures et nourrir tout ce petit monde.


Clara : la petite sœur toujours flanquée d’un appareil photo

Louna : la grande sœur, infirmière, qui a des jumelles

Thérèse : autre sœur qui est voyante

Jérémy : petit frère turbulent qui a fait brûler son école avec une expérience de bombe artisanale

Le Petit : Le petit frère aux lunettes roses qui fait de drôles de rêves et dessinent des horreurs.

La mère : Toujours en voyage qui ne revient que pour donner naissance à un autre enfant et repartir.


Si vous voulez du dépaysement, une écriture  qui est tout sauf académique, une épopée familiale déjantée, alors la série des « Malaussène » ne pourra que vous séduire.


Et puis un style qui est drôle, impertinent, enlevé, rythmé, avec le sens de la formule et de l’agencement des différents types de vocabulaire.

Bonnes et belles lectures

JC Togrège
18/07/2015


samedi 14 janvier 2017

CINE /// YOUR NAME

YOUR NAME
DE MAKOTO SHINKAI
 

Je découvre depuis peu les films d'animation japonais et cela grâce à une partition reprenant les thèmes des musiques de films de Hayao Miyazaki composées par Jo Hisaishi. Le charme de ces mélodies m'a conduit vers les films qui sont d'une grande beauté et très onirique. Comme quoi, il y a des ponts entre les arts, l'un menant vers l'autre.

Et alors, admiratif, j'ai plongé dans un autre monde cinématographique à cent lieues des réalisations Disney Pixar. Les jeunes qui m'ont recommandé ces films avaient cent fois raison, merci à eux.

Pour ces raisons, nous sommes allés voir "Your Name" d'un autre réalisateur japonais, Makoto Shinkai. Quelle merveille !

C'est graphiquement très joli, les plans sont à couper le souffle, les paysages magnifiques, la ville est très bien dépeinte. Au delà de cette réussite visuelle, le scénario est ambitieux et original, l'intrigue bien plus développée que ce à quoi l'on peut s'attendre en ayant vu la bande annonce.

Il s'y ajoute du fantastique, de l'émotion, de la poésie et de l'humour, sans oublier une BOF intéressante du groupe Radwimps.

En quelques mots, il s'agit de l'histoire de deux adolescents, le garçon vivant à Tokyo et la jeune-fille à la campagne, qui vont de façon aléatoire et régulière migrer dans le corps de l'autre. Rêve ou réalité ? Comment vivre cette interchangeabilité de lieu, de sexe, de culture ?
Ils vont tomber amoureux l'un de l'autre mais comment se retrouver, ils ne se connaissent pas et oublient tout ensuite.

Vous aurez compris qu'il y a une histoire d'amour (une belle histoire, ce n'est pas "gnangnan" !) qui se déroule dans le cadre d'un mystère spatio temporel.

C'est le genre de films dont on se dit à la sortie de la salle : "Ah j'aimerais bien le revoir !", alors courrez-y, vous découvrirez une création d'une grande originalité.

Un regret, pourquoi ce titre en anglais ? Je ne sais pas ce que veut dire "Kimi no na wa" mais j'aurais préféré " Quel est ton nom ? "

Cinéphilement vôtre

JC Togrège
14/01/2017

PS : Un grand merci aussi à Guillaume, notre chef de musique, qui m'a donné envie de découvrir les dessins animés japonais.

mardi 10 janvier 2017

VOEUX ///

 
CE QUE J'AIMERAIS POUR CETTE NOUVELLE ANNEE
 

Ce que j'aimerais pour cette nouvelle année, c'est une humanité s'éveillant à la lucidité, un monde où l'homme comprendrait que la course au profit ne le mène à rien si ce n'est à l'avilissement de son âme et l'enlaidissement irréversible de son environnement.

Ce que j'aimerais pour cette nouvelle année, c'est un monde où la pureté ne serait pas honnie et présentée comme une faiblesse, où celui qui écrase ne serait pas considéré comme un homme fort, un  battant mais simplement comme un adepte de la brutalité de qui se détourner.

Ce que j'aimerais pour cette nouvelle année, c'est que l'homme ouvre les yeux sur la beauté et qu'il s'écarte de tout ce qui est insipidité, facilité de bas étage et vulgarité, qu'il réapprenne à réfléchir par lui-même hors du prêt à penser environnant.

Ce que j'aimerais pour cette nouvelle année, c'est une époque qui ne bafouerait pas ses idéaux et qui ne trahirait pas des mots si beaux que Fraternité et Egalité, une nouvelle ère qui ne placerait pas sur un piédestal de faux héros imbus de pouvoir et d'eux-mêmes mais dénués de réelle sensibilité et d'empathie.

Ce que j'aimerais pour cette nouvelle année, c'est une primauté de l'espérance sur le renoncement, c'est que nous ouvrions grands nos yeux et nos cœurs sur nos priorités, nous rappelant que la vie est un bien immense totalement provisoire.

Ce que j'aimerais, en somme, c'est l'avènement de l'utopie ...

JC Togrège

lundi 9 janvier 2017

LIVRE /// LA FIN DE LA NUIT DE FRANCOIS MAURIAC


LA FIN DE LA NUIT
FRANCOIS MAURIAC


Cela faisait bien une semaine que je passais d'un livre à un autre, sans les finir, comme en état de manque d'un roman qui m'embarquerait vraiment en voyage dans son monde. Tout dépendant à la lecture sait combien cela attriste de picorer ainsi sans trouver ce qui nous emmène ailleurs.

Et puis, en regardant ma PAL, je tombais sur un poche acheté d'occasion " La fin de la nuit" de Mauriac. En regardant la 4ème de couverture, je vis qu'il s'agissait de la suite de "Thérèse Desqueyroux" ! J'ignorais totalement que ce personnage si attachant et énigmatique avait repris vie dans ce roman publié en 1935 et me jetai avidement dessus.

Nous retrouvons Thérèse, en femme vieillissante et malade à Paris, mais toujours avec son esprit acéré et transgressif. Elle a toujours son don d'observation, son aptitude à déceler la médiocrité, la bien pensance, la bassesse.

Elle vécut libre à Paris et se trouve maintenant malade cardiaque. Elle souffre de la solitude et traine en elle comme un boulet cette tentative d'empoisonnement de son mari pour lequel elle eut un non lieu alors que coupable. Mais rappelons-nous,  à l'époque, la famille avait voulu sauvé les apparences.

Sa fille,  Marie - 17 ans, qu'elle n'a pas vue depuis plusieurs années, vient la trouver à son domicile pour lui demander de l'aide dans une histoire d'amour...

Et alors, lecteur heureux, je fus de nouveau comme "envahi" par la profondeur psychologique, l'âme torturée du personnage et la beauté classique du style de Mauriac.


Extrait :

" Durant ses insomnies, Thérèse errait en pensée sur ce champ de bataille, retournait les cadavres, cherchait un visage encore intact. Combien en restait-il dont le souvenir fût pour elle sans amertume ? Il avait fallu bien peu de temps à la plupart de ceux qui l'avaient aimée, pour découvrir en elle cette puissance de destruction. Seuls, l'aidaient encore les êtres qu'elle n'avait fait qu'entrevoir, qui s'étaient avancés sur le bord de sa vie, de ceux-là seulement elle pouvait attendre une consolation : des inconnus rencontrés une nuit et jamais revus..."


Bonne et belle lecture

JC Togrège
09/01/2017


PS : j'ai remis dans mon blog ma chronique de 2013 sur Thérèse Desqueyroux

LECTURE /// CINE //// THERESE DESQUEYROUX


THERESE DESQUEYROUX
FRANCOIS MAURIAC

 
 

Il est des figures romanesques qui ont une réalité dépassant nombre de vivants et qui demeurent en nous comme des rencontres réelles. Il en est ainsi de cette énigmatique Thérèse Desqueroux créée par François Mauriac en 1927. Une de ces personnalités ambivalentes et secrètes que l'on cherche à comprendre !

Je suis revenu à ce personnage après en avoir vu l'adaptation cinématographique  de Claude Miller, et depuis je me suis replongé avec délice dans l'œuvre de Mauriac.

Commençons par le film et la magistrale interprétation d'Audrey Tautou qui réussit le tour de force d'un jeu tout en intériorité, le drame d'une âme qui souffre de sa condition, de cet esprit de famille qu'elle exècre et qui l'étouffe. Claude Miller (décédé en 2012) signe là son dernier film et c'est une réussite. Il a réussi à rendre l'atmosphère du roman, le temps qui s'étire à n'en plus finir avec l'impression d'être sans vivre réellement, anéanti par le poids de la fatalité.

Thérèse Desqueroux, c'est avant tout une femme qui se sent inadaptée à cette vie faite de conventions étriquées, à ce mariage de convenances, à la place réservée aux femmes en ce début du XXème siècle, à cette vie sans spiritualité. De cette inadaptation surgira, presque par hasard, le passage consistant à empoissonner son mari.

J'ai revu la version réalisée par Georges Franju en 1962 où Emmanuelle Riva fut également une excellente "Thérèse Desqueroux" avec dans le rôle de l'époux Philippe Noiret.

Mais, revenons à  François Mauriac que je vous invite à redécouvrir pour la maîtrise de sa plume et l'épaisseur psychologique de ses personnages.

Extrait :

Thérèse, à ce moment de sa vie, se sentait détachée de sa fille comme de tout le reste. Elle apercevait les êtres et les choses et son propre corps et son esprit même, ainsi qu'un mirage, une vapeur suspendue en dehors d'elle. Seul, dans ce néant, Bernard prenait une réalité affreuse : sa corpulence, sa voix du nez, et ce ton péremptoire, cette satisfaction. Sortir du monde... Mais comment ? et où aller ? Les premières chaleurs accablaient Thérèse. Rien ne l'avertissait de ce qu'elle était au moment de commettre. Que se passa t-il cette année ? ... "

Une autre recommandation, celle de  "Nœuds de vipères", la confession épistolaire d'un homme qui déteste sa famille et cherche le moyen de la déposséder de sa fortune, un homme torturé cas se croyant incapable d'aimer et d'être aimé.

Bonne lecture

JC Togrège
10/03/2013

samedi 7 janvier 2017

CINE /// LE COEUR EN BRAILLE

LE COEUR EN BRAILLE
DE MICHEL BOUJENAH
 
avec Alix Vaillot, Jean-Stan du Parc, Charles Berling, Pascal Elbé 

Michel Boujenah est un tendre, il vit dans un monde juste à côté du nôtre, un monde plus lumineux, plus juste, plus beau où les possibles se réalisent. Ce n'est pas qu'il ignore la dureté de notre société, mais que voulez-vous, il lui reste dans le cœur ce quelque chose de l'enfance qui fait pétiller son regard. Cela se voit aussi bien dans ses spectacles que dans ses films.

Pour "le cœur en braille", il nous raconte l'histoire de Marie, une pré-ado d'une douzaine d'années, passionnée de musique (elle est violoncelliste), très bonne élève qui sait qu'elle va devenir aveugle, sa maladie s'aggravant inéluctablement. Elle le sait pertinemment mais une seule chose compte pour elle, masquer la gravité de sa situation pour passer le concours supérieur du conservatoire.

Alix Vaillot, dans ce rôle de Marie, est fantastique tant elle sait exprimer de choses différentes dans son regard : tantôt mutine, inquiète, passionnée (quand on la voit jouer), déterminée, désespérée mais toujours avec le refus d'être prise en pitié.

Elle va entrer en connivence avec Victor, le cancre de la classe, qui va l'aider à masquer son handicap pour ne pas entrer dans l'institut d'aveugles à laquelle le destine son père.
Une connivence entre deux jeunes, les premiers émois du cœur, comme un tout premier amour "seuls contre tous".

Alors, disons-le de suite, ce film a de sérieux "handicaps" : il n'y a ni sexe, ni violence, ni vulgarité et les jeunes ne vivent pas dans une cité ! Est-ce pour cela que les critiques l'éreintent autant ?

D'ailleurs Michel Boujenah le sait car il a déclaré :" Je sais qu'on va m'attaquer sur mon côté bons sentiments, mon côté un peu guimauve. On a besoin de rêver, on a besoin de tendresse, ce n'est pas mièvre mon film. Ce n'est pas un film qui fait du mal, c'est un film qui fait du bien."

Il a raison. Au delà de quelques maladresses, d'une fin que l'on devine facilement, c'est un film qui fait du bien, un film qui met en avant des enfants bousculant le monde des adultes.

Certains y verront de la sensibilité, de la fraîcheur, d'autres de la sensiblerie et de la naïveté, c'est selon. Peut-être, faut-il un côté "fleur bleue" pour être touché par son message ?

Certes, il frôle le mélo mais c'est rattrapé par des petites notes d'humour, et tant pis si nous y laissons quelques larmes à la fin, après tout ça fait du bien.

En somme un joli film à voir en famille pour un monde à la Boujenah, où le beau l'emporte toujours.

Cinéphilement vôtre

JC Togrège
07/01/2016

PS : Journée qui resta dans le "bleu", malgré le temps, car le soir sur France 3, nous eûmes une belle émission avec Renaud Capuçon. De la musique classique à 20h50, c'est la preuve que tout est possible, non ?