vendredi 26 avril 2024

ALAIN CHAMFORT : L'IMPERMANENCE - Un album très abouti -

 ALAIN CHAMFORT
L'IMPERMANENCE


Alain Chamfort vient de sortir un album très abouti avec des textes d'une grande qualité dus à la plume de René Dominique Burgaud. Quant à la musique, il en est le compositeur toujours aussi inspiré.

La pochette représente des fleurs, symbole de l'impermanence, concept qui vient du bouddhisme pour signifier que rien ne dure, que rien n'est permanent, éternel, que tout meurt.

Les thèmes abordés sont très divers, ceux d'un homme qui s'interroge sur le monde qui l'entoure. Une grande place est réservée à un ensemble de cordes, avec également quelques titres plus "pop".



Une fan
Nous avons eu la chance de participer à une rencontre limitée à une trentaine de personnes au siège du journal l'Union. Après un échange entre le journaliste et le chanteur, chacun a pu poser des questions à Alain Chamfort qui a répondu avec simplicité et humour. 

Ce fut un exercice avec lequel il se prêta de bonne grâce, ce qui correspond bien à la personne sympathique qu'il est.

Parmi les fans réunis, tous avaient des préférences parmi un répertoire éclectique de tant de décennies. Les premières années furent évoquées, l'incontournable "Manureva" mais aussi les albums plus récents avec des textes exigeants et d'une écriture particulièrement soignée.

Parmi les 11 titres de l'album,  j'apprécie tout particulièrement :

A l'aune", une ballade nostalgique avec piano 
" Après la vague reste l'écume
après le concert les costumes
après l'amour une amertume
dur d'être après ce que nous fûmes"

La Grâce 
"Aurai-je su toucher les gens
autant que ceux qui m'ont touché
trouver la part d'humanité
qu'on a tous indifféremment"

Il y aussi un titre pop positif "Tout s'arrange à la fin" écrit par son parolier précédent, Jacques Duval, et puis  "Whisky Glace" avec Sébastien Tellier.

Je vous recommande également son album précédent "Le désordre des choses", autre collaboration très réussie avec Pierre-Dominique Burgaud dans une ambiance plus "pop" que "l'Impermanence".



Voilà un artiste qui a su se renouveler, se relever lors des échecs pour mieux rebondir sans se trahir et sans se répéter.

Un artiste authentique d'une grande élégance.





Musicalement vôtre

J-C Togrège
26/04/2024

samedi 20 avril 2024

CINE /// ANATOMIE D'UNE CHUTE : une palme d'or 2023 bien méritée !

 ANATOMIE D'UNE CHUTE
DE JUSTINE TRIET

avec Sandra Hüller, Milo Machado-Craner,
 Swann Arlaud



Habituellement, mes chroniques se font quelques jours après avoir vu le film, afin de ne pas perdre le fil de mes impressions et du récit.

Pour "Anatomie d'une chute", cela doit bien faire un mois qu'il me reste en mémoire, ce qui en démontre sa force.

Un couple et son enfant vivent à la montagne loin de tout. Un jour, le père est retrouvé mort au pied du chalet. Est-il tombé malencontreusement, s'est-il suicidé ou bien a t-il été poussé ?

Une enquête commence et très vite son épouse est suspectée, d'autant que le couple était en crise. Un procès s'ensuivra.



L'enfant, malvoyant, est tiraillé entre ses sentiments pour ses deux parents. Non seulement il est triste car son père est mort, mais en plus il craint de perdre sa mère qui risque la prison. Et surtout quelle est la vérité ? Sa mère aurait-elle pu tuer son mari ? Dilemme affreux pour l'enfant ! Et pour la mère qui veut garder la confiance de son fils, comme c'est difficile...

Nous assistons au procès où la vie du couple sera décortiquée, faisant surgir l'intime au grand jour. D'un côté une écrivaine à succès et de l'autre un homme en peine d'inspiration qui n'arrive plus à écrire, un couple qui n'est plus sur la même longueur d'ondes, tout en continuant à s'aimer à leur façon.

Ce film est brillant et intelligent, la réalisation efficace et les acteurs de très haut niveau. Il fait aussi penser à la difficulté extrême d'être un juré d'assises. Comment savoir ce qui est vrai ou faux quand les preuves formelles manquent ?

Une palme d'or 2023 bien méritée pour un film qu'on n'oublie pas.

Cinéphilement vôtre

J-C Togrège

vendredi 5 avril 2024

CINE : BOLERO

 BOLERO 
de Anne Fontaine

avec Raphaël Personnaz, Donna Tillier,
 Jeanne Balibar, Emmanuelle Devos


Plus qu'un simple film biographique sur la vie du génial compositeur, c'est aussi l'histoire de la naissance du "Boléro" et surtout celle de la création musicale.

Maurice Ravel entend la musique dans sa tête mais a parfois du mal à la retranscrire, et puis il lui arrive de ne pas trouver l'inspiration comme pour ce ballet que lui a commandé la célèbre danseuse russe, Ida Rubinstein. Et c'est alors la page blanche avec aucune note qui ne vient dessus, ou alors rien qui ne le satisfasse. 

Mais l'air de rien, l'inspiration arrive par fragments d'idée, subrepticement. Et puis le doute jusqu'à la création du ballet en 1928 avec la musique du Boléro, œuvre devenue depuis universellement connue et jouée un peu partout.

Autant dire que j'ai trouvé remarquable toute cette partie sur le processus créatif.


La réalisatrice sait nous peindre un personnage introverti, exprimant peu ses sentiments, dont l'histoire d'amour principale est celle qu'il vit avec la musique. 

Deux femmes auront un rôle capital dans sa vie : Misia, sa muse jouée par Jeanne Balibar, et Marguerite Long, son amie pianiste interprété par Emmanuelle Devos.

Tout au long du film, nous avons le plaisir d'entendre la musique de Ravel : Pavane pour une infante défunte, la valse, le magnifique concerto pour piano en sol majeur, Alborata del gracioso, etc. Et puis, pour parachever le tout, nous avons droit à une superbe chorégraphie sur le Boléro.

Raphaël Personnaz excelle dans ce rôle où il est totalement crédible y compris dans les scènes d'interprétation, même si pour certaines ce sont les mains d'Alexandre Tharaud que nous voyons à l'écran.

Si le rythme très lent du film peut surprendre au début, l'on se laisse vite séduire par cette façon de faire, emporté par l'interprétation des acteurs, la reconstitution d'époque (certains  plans ont été tournés dans la maison de Ravel) et évidemment par la musique du compositeur.

Cinéphilement et musicalement

J-C Togrège
05/04/2024

dimanche 31 mars 2024

CHANGEMENT D'HEURE

 CHANGEMENT D'HEURE



Le changement d'heure peut s'avérer dangereux

Changement d'heure

Avancer ou reculer l'aiguille
Est-ce une heure qu'on nous dérobe
Ou une surnuméraire qui se faufile ?
Contrainte qu'il faut que l'on gobe !

L'aiguille doit avancer ou reculer !
Serait-il possible de refuser
Et du reste du pays se décaler ?
C'est imposé et non à discuter.

Avancer ou reculer l'aiguille
Même conséquence qui m'étrille
Celle d'un rendez-vous manqué
Mes rêves sur un autre horaire demeurés.

Texte de J-C Togrège
Illustration de Jean- Jacques Dumont

vendredi 15 mars 2024

LIVRE /// LA LANGUE DES CHOSES CACHEES de Cécile Coulon

LA LANGUE DES CHOSES CACHEES
CECILE COULON


Quel beau titre poétique et mystérieux ! 

Il donne envie de se plonger dans le nouveau roman de Cécile Coulon.

Dès le prologue, l'on constate comme l'écriture est belle, riche, maîtrisée, le vocabulaire choisi avec soin. C'est beau et fort en même temps, et l'on comprend que ce sera un conte et qu'il sera noir parce que les hommes maltraitent le monde.

L'époque n'est pas précisée, les personnages n'ont pas de nom (c'est Le Fils, L'homme aux épaules rouges, La Mère, La Femme aux yeux verts), le récit est à la lisière du fantastique dans un petit village reculé qui se nomme "Le fond du puits"


Le Fils est ce qu'on peut appeler un guérisseur et c'est la première fois qu'il va "officier" seul sans sa mère qui n'est plus en mesure de voyager. C'est donc particulier pour ce Fils qui se demande s'il va être à la hauteur, s'il va être accepté et savoir décrypter "la langue des choses cachées" pour soulager ceux qui l'ont appelé.

" Cent fois il avait accompagné sa mère quand elle était appelée - il n'y avait pas d'autre manière de le dire, elle était appelée -, quand les hommes ne savaient plus où demander de l'aide. Les hôpitaux étaient trop loin, les médecins absents, les vieux refusaient d'être soignés autrement que par des coupeurs de feu, des guérisseurs, des rebouteux. Les noms qu'on donnait à sa mère, elle s'en accommodait, et quand son fils lui demandait comment elle se définissait, elle répondait : " Nous voyons des choses cachées et il n'y pas de mot pour cela"

Le Fils saura t-il lire les choses cachées dans les silences qui recouvrent les secrets des Hommes ? De ces silences qui agissent sur l'esprit et le corps des gens ? Ces silences, ces secrets difficiles à vivre qui provoquent des maladies incompréhensibles ? 

Sa mère lui avait enjoint de ne ne s'occuper que de la personne pour qui il était appelée, en l'occurrence un enfant, mais il ne pourra pas et sera happé par une vieille histoire...

Un roman différent d'une grande force !

Bonne lecture

J-C Togrège
15/03/2024

jeudi 14 mars 2024

LIVRE /// MRS DALLOWAY de Virginia Woolf

MRS DALLOWAY
VIRGINIA WOOLF


Une émission littéraire vue il y a quelque temps m'avait fait mettre sur ma LAL (liste à lire) le nom de Virginia Woolf.

Présentée comme une autrice majeure, novatrice et féministe, je m'étais dit qu'il me fallait combler cette lacune.

L'ennui avec les livres mis sur un piédestal, c'est qu'ils font un peu "peur", ce qui est absurde en soi. Libre à chacun d'aimer ou non un livre et peu importe s'il a fait l'objet de louanges dithyrambique par ailleurs.

Toujours est-il que je l'ai abordé avec beaucoup d'attente, tant de lecteurs et lectrices le considérant comme un chef d'œuvre.

Alors ? Alors ?


"Mrs Dalloway" c'est d'abord une écriture qui nous apprend à ralentir notre lecture, étant le contraire des romans où l'action est telle que les pages défilent à toute allure. Cela pour deux raisons : d'abord il n'y a pas d'intrigue (certains pourraient penser qu'il ne s'y passe rien) et puis parce que c'est un style ciselé et riche avec de longues phrases se prêtant bien à la lecture à voix haute.

Paru en 1925, ce livre raconte une journée de Mrs Dalloway, femme d'une cinquantaine d'années de la haute société londonienne qui s'apprête à donner sa soirée mondaine. 

Elle va revoir Peter Walsh, rentré des Indes, qu'elle a aimé et qui est resté son ami, repenser à Sally son amie d'enfance.

Il s'agit d'une introspection, d'un dialogue intérieur mêlant le passé et le présent, de sensations, d'états d'âme.

Clarissa (c'est son prénom) a choisi le conformisme en épousant sans passion Richard Dalloway, qui a fait d'elle une femme établie, tout cela étant loin de ce qu'elle pouvait espérer quand elle était jeune. L'on peut dire qu'il y a Clarissa d'un côté (son être profond) et Mrs Dalloway (son être social établi).

Il s'y trouve un autre personnage très intéressant, Septimus, homme profondément marqué par la guerre et qui sombre dans la folie. Cela nous vaut des pages très particulières sur ses visions, sur ce qu'il ressent. Malgré le soutien de son épouse, il sombrera de plus en plus.

C'est indéniablement un livre très bien écrit avec des passages poétiques et qui n'est pas si facile que cela d'accès.

J'y ai vu un peu une analogie dans le style et "l'ambiance" avec Marcel Proust qui fut d'ailleurs son contemporain.

Bonne lecture.

J-C Togrège
14/03/2024

mercredi 6 mars 2024

Parez de poésie la vie

 
PAREZ DE POESIE LA VIE


Les mots claquent bruts, crus, durs
Si frontalement tout se crie
Sans finesse ni demi-mesure
Si brutalement tout se dit.

Moi, je préfère 
Ce qui se pressent
Se sous-entend
Se suggère.

C'est grossier, la foule s'esclaffe
A la bassesse, pas d'interdit
Le vulgaire signe des autographes
Sans retenue, l'on applaudit.

Moi, je préfère
Les mots d'orfèvre
Ce qui se nuance
Fait double sens.

Enfants de ce monde à venir
De beauté ne soyez jamais assouvis
Soyez subtils pour ne pas flétrir,
Parez de poésie la vie.

J-C Togrège
( extrait du recueil "Les bourgeons renaîtront")