D’OSCAR WILDE
Parler d’un classique de la littérature est toujours un exercice difficile, tant de choses ayant déjà été dites et écrites sur l’œuvre. Soit l’on paraphrase, soit on a l’impression de survoler et réduire la pensée de l’auteur.
Je dirai
déjà le plaisir à lire cette belle langue du 19ème siècle que maîtrisait
parfaitement Oscar Wilde, et le salut intellectuel à se plonger dans le passé,
histoire de se rappeler que les certitudes d’une époque ne sont pas celles
d’une autre. Ne pas rester dans la lecture de romans contemporains aide ainsi à
mon sens à penser par soi-même et à fuir le « politiquement
correct ».
Le roman
commence par le tableau que fait un peintre d’un jeune homme, Dorian Gray,
d’une stupéfiante beauté. Ce dernier en
est tellement ébloui qu’il forme un vœu :
« Si je demeurais toujours jeune et que
le portrait vieillisse à ma place ! Je donnerai tout, pour qu’il en soit
ainsi. Il n’est rien au monde que je donnerais. Je donnerais mon âme ! »
Sous l'influence d'un homme du monde oisif et cynique, Dorian Gray va devenir un dépravé,
plongeant dans tous les vices, préoccupé de son seul plaisir, insensible aux
autres. Alors que son âme va se noircir
et se refléter sur le tableau, son visage demeurera inchangé, sans ces marques
du temps qui nous révèlent. Il conservera le visage d’un ange tout en étant un parfait
malfaisant.
Il échappe
ainsi à ce qu’écrit le sociologue David le Breton : « Le visage est un mi-dire, un chuchotement de l’identité
personnelle... ».
Ce roman,
c’est bien sûr beaucoup plus, avec des
thèmes comme l’hédonisme, la puissance de l’art, l’évocation feutrée de
l’homosexualité, la critique de la société de son époque et de certaines de ses
institutions (l’Eglise, le mariage), la succulence des dialogues et le cynisme
de certaines théories (extrait ci-dessous)
« La raison pour
laquelle nous tenons tant à penser du bien des autres, c’est que nous avons
peur de nous-mêmes. Le fondement de l’optimisme, c’est la terreur absolue. Nous
croyons être généreux en prêtant à autrui des vertus susceptibles de nous être
de quelque utilité. Nous ne tarissons pas d’éloges pour le banquier qui tolère
un découvert et trouvons quelque qualité au bandit de grand chemin dans
l’espoir qu’il ne nous soulagera pas de notre bourse. Je pense tout ce que j’ai
dit. Je n’ai que du mépris pour l’optimisme. Pour ce qui est des vies gâchées,
seule est gâchée la vie de celui qui cesse de se développer. Si vous voulez
abîmer un être, vous n’avez qu’à vouloir le changer. Pour ce qui est du mariage,
bien sûr que ce serait bête, mais il existe d’autres liens plus intéressants
entre les hommes et les femmes et que j’ai bien l’intention de cultiver. »
Une très belle adaptation cinématographique fut faite de ce
roman en 1945 par Albert Lewin, adaptation
que je vous recommande également et qui est disponible dans toutes les
bonnes médiathèques.
Bonne et belle lecture.
JC Togrège
11/2016
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